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France / Algeria / French PolynesiaLOI n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français (1)

LOI n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français (1)

Dernière mise à jour des données de ce texte : 25 mars 2019 NOR : DEFX0906865L
JORF n°0004 du 6 janvier 2010
Dossier Législatif : LOI n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français / Échéancier d’application
L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article 1

Modifié par LOI n°2021-1900 du 30 décembre 2021 – art. 179

I. – Toute personne souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français et inscrite sur une liste fixée par décret en Conseil d’Etat conformément aux travaux reconnus par la communauté scientifique internationale peut obtenir réparation intégrale de son préjudice dans les conditions prévues par la présente loi.

II. – Si la personne est décédée, la demande de réparation peut être présentée par ses ayants droit. Si elle est décédée avant la promulgation de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, la demande doit être présentée par l’ayant droit avant le 31 décembre 2024. Si la personne décède après la promulgation de la même loi, la demande doit être présentée par l’ayant droit au plus tard le 31 décembre de la troisième année qui suit le décès.

III.-Lorsqu’une demande d’indemnisation fondée sur le I de l’article 4 a fait l’objet d’une décision de rejet par le ministre de la défense ou par le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, le demandeur ou ses ayants droit, s’il est décédé, peuvent présenter une nouvelle demande d’indemnisation avant le 31 décembre 2020.

Article 2

Modifié par LOI n°2013-1168 du 18 décembre 2013 – art. 53

La personne souffrant d’une pathologie radio-induite doit avoir résidé ou séjourné :

1° Soit entre le 13 février 1960 et le 31 décembre 1967 au Centre saharien des expérimentations militaires, ou entre le 7 novembre 1961 et le 31 décembre 1967 au Centre d’expérimentations militaires des oasis ou dans les zones périphériques à ces centres ;

2° Soit entre le 2 juillet 1966 et le 31 décembre 1998 en Polynésie française.

Un décret en Conseil d’Etat délimite les zones périphériques mentionnées au 1°.

Article 3

Modifié par LOI n°2013-1168 du 18 décembre 2013 – art. 53

Le demandeur justifie, en cas de besoin avec le concours des administrations concernées, que la personne visée à l’article 1er a résidé ou séjourné dans les zones et durant les périodes visées à l’article 2 et qu’elle est atteinte de l’une des maladies figurant sur la liste établie en application de l’article 1er.

Article 4

Modifié par LOI n°2019-222 du 23 mars 2019 – art. 102

I.-Les demandes d’indemnisation sont soumises au comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, qui se prononce par une décision motivée dans un délai de huit mois suivant le dépôt du dossier complet.

II.-Le comité d’indemnisation, qui est une autorité administrative indépendante, comprend neuf membres nommés par décret :

1° Un président, dont la fonction est assurée par un membre du Conseil d’Etat ou par un magistrat de la Cour de cassation, sur proposition, respectivement, du vice-président du Conseil d’Etat ou du premier président de la Cour de cassation ;

2° Huit personnalités qualifiées, dont au moins cinq médecins, parmi lesquels au moins :

-deux médecins nommés sur proposition du Haut Conseil de la santé publique en raison de leur compétence dans le domaine de la radiopathologie ;

-un médecin nommé sur proposition du Haut Conseil de la santé publique en raison de sa compétence dans le domaine de la réparation des dommages corporels ;

-un médecin nommé sur proposition du Haut Conseil de la santé publique en raison de sa compétence dans le domaine de l’épidémiologie ;

-un médecin nommé, après avis conforme du Haut Conseil de la santé publique, sur proposition des associations représentatives de victimes des essais nucléaires.

Les huit personnalités qualifiées comprennent quatre femmes et quatre hommes.

Des suppléants de ces personnalités qualifiées sont désignés dans les mêmes conditions. Ils remplacent les membres titulaires en cas d’absence ou d’empêchement.

Le président peut désigner un vice-président parmi ces personnalités qualifiées.

Le mandat des membres du comité est d’une durée de trois ans. Ce mandat est renouvelable, sous réserve du huitième alinéa du présent II.

En cas de partage égal des voix, celle du président du comité est prépondérante.

Dans l’exercice de leurs attributions, les membres du comité ne reçoivent d’instruction d’aucune autorité.

III. (Abrogé)

IV. Le président du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires a qualité pour agir en justice au nom du comité.

V.-Ce comité examine si les conditions sont réunies. Lorsqu’elles le sont, l’intéressé bénéficie d’une présomption de causalité, à moins qu’il ne soit établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français reçue par l’intéressé a été inférieure à la limite de dose efficace pour l’exposition de la population à des rayonnements ionisants fixée dans les conditions prévues au 3° de l’article L. 1333-2 du code de la santé publique.

Le comité procède ou fait procéder à toute investigation scientifique ou médicale utile, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel.

Il peut requérir de tout service de l’Etat, collectivité publique, organisme gestionnaire de prestations sociales ou assureur communication de tous renseignements nécessaires à l’instruction de la demande. Ces renseignements ne peuvent être utilisés à d’autres fins que cette dernière.

Les membres du comité et les agents désignés pour les assister doivent être habilités, dans les conditions définies pour l’application de l’article 413-9 du code pénal, à connaître des informations visées aux alinéas précédents.

Dans le cadre de l’examen des demandes, le comité respecte le principe du contradictoire. Le demandeur peut être assisté par une personne de son choix.

VI. ― Les modalités de fonctionnement du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, les éléments que doit comporter le dossier présenté par le demandeur, ainsi que les modalités d’instruction des demandes, et notamment les modalités permettant le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense, sont fixés par décret en Conseil d’Etat. Elles doivent inclure la possibilité, pour le requérant, de défendre sa demande en personne ou par un représentant.

VII.-(Abrogé).

NOTA :Conformément au A du XXIV de l’article 109 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, ces dispositions entrent en vigueur à compter du prochain renouvellement de chaque commission.

Article 5

L’indemnisation est versée sous forme de capital.
Toute réparation déjà perçue par le demandeur à raison des mêmes chefs de préjudice, et notamment le montant actualisé des pensions éventuellement accordées, est déduite des sommes versées au titre de l’indemnisation prévue par la présente loi.

Article 6

L’acceptation de l’offre d’indemnisation vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil et désistement de toute action juridictionnelle en cours. Elle rend irrecevable toute autre action juridictionnelle visant à la réparation des mêmes préjudices.

Article 7

Modifié par LOI n°2013-1168 du 18 décembre 2013 – art. 53

Le Gouvernement réunit au moins deux fois par an une commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires. Cette dernière peut également se réunir à la demande de la majorité de ses membres. La commission comprend dix- neuf membres dont quatre représentants de l’administration, le président du gouvernement de la Polynésie française ou son représentant, le président de l’assemblée de la Polynésie française ou son représentant, deux députés, deux sénateurs, cinq représentants des associations représentatives de victimes des essais nucléaires ainsi que quatre personnalités scientifiques qualifiées dans ce domaine.

La commission est consultée sur le suivi de l’application de la présente loi ainsi que sur les modifications éventuelles de la liste des maladies radio-induites. A ce titre, elle peut adresser des recommandations au Gouvernement et au Parlement.

Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités de désignation des membres et les principes de fonctionnement de la commission.

Article 8

A modifié les dispositions suivantes
Modifie Code général des impôts, CGI. – art. 81 (V)
La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat. Fait à Paris, le 5 janvier 2010.

Par le Président de la République :
Nicolas Sarkozy
Le Premier ministre,
François Fillon
La ministre d’Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, 
Michèle Alliot-Marie
Le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, 
Brice Hortefeux
Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat,
Eric Woerth
Le ministre de la défense,
Hervé Morin
La ministre de la santé et des sports, 
Roselyne Bachelot-Narquin
La ministre auprès du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l’outre-mer, 
Marie-Luce Penchard

(1) Travaux préparatoires : loi n° 2010-2. Assemblée nationale : Projet de loi n° 1696 ; Rapport de M. Patrice Calméjane, au nom de la commission de la défense, n° 1768 ; Discussion le 25 juin 2009 et adoption, après engagement de la procédure accélérée, le 30 juin 2009 (TA n° 308). Sénat : Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, n° 505 rectifié (2008-2009) ; Rapport de M. Marcel-Pierre Cléach, au nom de la commission des affaires étrangères, n° 18 (2009-2010) ; Texte de la commission n° 19 (2009-2010) ; Discussion et adoption le 14 octobre 2009 (TA n° 5, 2009-2010). Assemblée nationale : Projet de loi n° 1984 ; Rapport de M. Patrice Calméjane, rapporteur, au nom de la commission mixte paritaire, n° 2098 ; Discussion et adoption le 22 décembre 2009 (TA n° 389). Sénat : Rapport de M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur, au nom de la commission mixte paritaire, n° 122 (2009-2010) ; Discussion et adoption le 22 décembre 2009 (TA n° 49, 2009-2010).

Décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français

Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de la défense,
Vu le code de la défense, notamment son article L. 4221-1 ;
Vu la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 modifiée relative aux experts judiciaires, notamment son article 2 ;
Vu la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 modifiée relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français ;
Vu la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense, notamment le III de son article 54 ;
Vu le décret n° 92-681 du 20 juillet 1992 modifié relatif aux régies de recettes et aux régies d’avances des organismes publics ;
Vu le décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 modifié relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif, notamment ses articles 9 à 14 ;
Vu le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’Etat ;
Le Conseil d’Etat (section de l’administration) entendu,
Décrète :

Chapitre Ier : Maladies et zones concernées (Articles 1 à 2)

Article 1

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 1

La liste des maladies mentionnée à l’article 1er de la loi du 5 janvier 2010 susvisée est annexée au présent décret. Les maladies figurant sur cette liste mais ayant pour origine des métastases secondaires à une maladie n’y figurant pas ne sont pas retenues pour l’application de ces dispositions.

Article 2

Les zones du Sahara mentionnées au 1° de l’article 2 de la loi du 5 janvier 2010 susvisée sont celles qui sont inscrites, d’une part, dans un secteur angulaire de 10 degrés centré sur le point (0 degré 3 minutes 26 secondes ouest – 26 degrés 18 minutes 42 secondes nord) compris entre l’azimut 100 degrés et l’azimut 110 degrés sur une distance de 350 kilomètres et, d’autre part, dans un secteur angulaire de 40 degrés centré sur le point (5 degrés 2 minutes 30 secondes est – 24 degrés 3 minutes 0 seconde nord) compris entre l’azimut 70 degrés et l’azimut 110 degrés sur une distance de 40 kilomètres et prolongé sur l’axe d’azimut 90 degrés par un secteur rectangulaire de longueur 100 kilomètres.

Chapitre II : Fonctionnement du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Articles 3 à 9)

Article 3

Le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires se réunit sur convocation de son président.
La convocation précise l’ordre du jour.
La forme et le délai de convocation des membres du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires sont fixés par le règlement intérieur du comité mentionné à l’article 9.
Le comité ne peut valablement délibérer que si cinq au moins de ses membres sont présents.

Article 4

I. – Les personnels du comité sont recrutés par le président du comité, dans la limite des crédits ouverts à cet effet au budget des services du Premier ministre au titre du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires.

II. – Le président du comité peut également faire appel, avec l’accord des ministres intéressés, à des personnels mis à disposition par les services de l’Etat dont le concours est nécessaire à l’accomplissement de sa mission. Il peut faire appel aux réservistes du ministère de la défense.

III. – Les agents publics de catégorie A ou assimilés peuvent, dans la limite de leurs attributions, recevoir délégation de signature du président du comité.

Article 5

Le président du comité a autorité sur l’ensemble des personnels du comité.

Article 6

Modifié par Décret n°2020-173 du 27 février 2020 – art. 18

Les membres mentionnés au second alinéa de l’article 5 sont indemnisés, après service fait, au titre de toute activité réalisée pour le compte de l’autorité, lorsque celle-ci ne fait pas l’objet de l’indemnité forfaitaire prévue au même article.
Cette indemnisation prend la forme de vacations dont le taux unitaire ne peut pas dépasser un plafond fixé par un arrêté du Premier ministre et des ministres chargés du budget et de la fonction publique.
Les règles d’attribution de ces vacations, notamment leur nombre maximal par membre au titre d’une année, sont précisées par le règlement intérieur prévu à l’article 14 de la loi du 20 janvier 2017 susvisée.

Article 7

Le comptable assignataire des recettes et des dépenses du comité est le contrôleur budgétaire et comptable ministériel des services du Premier ministre.

Article 8

Des régies de recettes et d’avances peuvent être créées par le président du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires sur avis conforme du contrôleur budgétaire et comptable ministériel des services du Premier ministre dans les conditions fixées par le décret du 20 juillet 1992 susvisé.

Article 9

Le comité établit son règlement intérieur, qui fixe, notamment, les conditions de son fonctionnement. La délibération portant adoption de ce règlement est publiée au Journal officiel de la République française.

Chapitre III : Modalités d’instruction des demandes d’indemnisation (Articles 10 à 14)

Article 10

Le dossier présenté par le demandeur comprend :

1° Tout document permettant d’attester qu’il est atteint de l’une des maladies figurant sur la liste annexée au présent décret ;

2° Tout document permettant d’attester qu’il a résidé ou séjourné dans les zones et durant les périodes mentionnées à l’article 2 de la loi du 5 janvier 2010 susvisée ;

3° Le cas échéant, tous documents relatifs aux autres procédures engagées par le demandeur concernant l’indemnisation des mêmes préjudices et les justificatifs des prestations et indemnités perçues à ce titre ;

4° Tous éléments de nature à éclairer le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires dans l’instruction du dossier.

Article 11

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 2

I.-Les demandes sont adressées par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, qui accuse réception du dépôt de la demande. Si le dossier est incomplet, il invite le demandeur à lui adresser les pièces manquantes.

Le comité procède à l’enregistrement du dossier complet, qui fait courir les délais prévus à l’article 4 de la loi du 5 janvier 2010 susvisée. Il informe sans délai le demandeur du caractère complet de son dossier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Lorsqu’une nouvelle demande d’indemnisation est présentée en application des dispositions du III de l’article 1er de la même loi, le comité demande, si nécessaire, la mise à jour du dossier initialement déposé. Il informe le demandeur du caractère complet de son dossier dans les mêmes conditions qu’au précédent alinéa.

II.-Le demandeur peut se faire assister d’une personne de son choix à toutes les étapes de la procédure.

Il peut à tout moment présenter des observations écrites et être informé de l’état d’avancement de la procédure. Il reçoit communication de toute pièce versée à son dossier et susceptible d’être prise en compte par le comité d’indemnisation.

Sur sa demande formulée par écrit auprès du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, le demandeur peut s’exprimer lui-même devant le comité pour défendre son dossier, ou désigner un représentant pour le faire en son nom. Dans cette hypothèse, les frais de déplacement du demandeur ou de son représentant sont à la charge du demandeur. Le demandeur ou son représentant peut également s’exprimer devant le comité par visioconférence ou conférence téléphonique.

Article 12

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 3

I.-Le comité peut faire réaliser des expertises à tous les stades de la procédure.

II.-Lorsque le comité recourt à une expertise médicale, le médecin chargé d’y procéder est choisi, en fonction de sa compétence dans le domaine concerné, notamment sur l’une des listes mentionnées au I de l’article 2 de la loi du 29 juin 1971 susvisée. En particulier, lorsque l’expertise médicale a pour finalité l’évaluation du préjudice devant être indemnisé, le médecin chargé d’y procéder est choisi en fonction de sa compétence en matière d’indemnisation du dommage corporel.

III.-Le demandeur est convoqué quinze jours au moins avant la date de l’examen, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Il est informé de l’identité et des titres du médecin chargé de procéder à l’expertise, ainsi que de l’objet, de la date et du lieu de l’examen. Il peut se faire assister d’une personne de son choix.

Le rapport du médecin chargé de l’examen du demandeur est adressé dans les deux mois au comité d’indemnisation par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ainsi qu’au demandeur et, le cas échéant, au médecin qu’il désigne.

IV.-Les frais exposés pour les expertises réalisées à la demande du comité sont pris en charge par ce dernier, y compris les frais de déplacement exposés par le demandeur pour s’y soumettre.

Article 13

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 4

La limite de dose efficace pour l’exposition de la population à des rayonnements ionisants pour l’application des dispositions du V de l’article 4 de la loi du 5 janvier 2010 précitée est celle fixée au I de l’article R. 1333-11 du code de la santé publique.

Le comité détermine la méthodologie qu’il retient pour instruire la demande et prendre sa décision, en s’appuyant notamment sur les méthodologies recommandées par l’Agence internationale de l’énergie atomique.

La délibération du comité approuvant cette méthodologie est publiée au Journal officiel de la République française. La description de cette méthodologie et la documentation y afférente sont publiées sur le site internet du comité et fournies au demandeur, à sa demande.

Article 14

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 5

I. – S’il estime les conditions remplies, le comité adresse au demandeur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une offre d’indemnisation qui précise les conséquences, fixées à l’article 6 de la loi du 5 janvier 2010 précitée, que son acceptation emporte. Le demandeur fait connaître, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, s’il accepte ou non cette offre. S’il l’accepte sans réserve, le demandeur peut faire connaître sa réponse par courrier électronique dont le comité accuse réception par la même voie.

II. – L’absence de décision du comité dans le délai de huit mois à compter de l’enregistrement de la demande par le comité d’indemnisation vaut rejet de la demande.

Chapitre IV : La commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires (Article 15)

Article 15

Modifié par Décret n°2019-520 du 27 mai 2019 – art. 6

Les séances de la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires mentionnée à l’article 7 de la loi du 5 janvier 2010 susvisée sont régies par les dispositions des articles R. 133-8 à R. 133-13 du code des relations entre le public et l’administration.

Sont membres de la commission consultative, au titre des représentants de l’administration :

1° Pour le ministre des affaires étrangères : le secrétaire général du ministère ou son représentant ;

2° Pour le ministre chargé de la santé : le directeur général de la santé ou son représentant ;

3° Pour le ministre de la défense : le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense ou son représentant ;

4° Pour le ministre chargé de l’outre-mer : le directeur général des outre-mer ou son représentant.

Le Premier ministre désigne par arrêté, pour une durée de trois ans, cinq associations représentatives de victimes des essais nucléaires qui désignent, chacune, leur représentant aux séances de la commission consultative.

Les personnalités qualifiées sont nommées pour une durée de trois ans par arrêté du Premier ministre.

La commission est présidée par le ministre chargé de la santé ou son représentant.

En fonction de l’ordre du jour, le président peut faire entendre par la commission toute personne dont l’audition paraît utile et solliciter de tout tiers qualifié un avis ou une consultation.

Les dépenses afférentes à la commission sont prises en charge par le budget des services du Premier ministre. Au titre de leur participation aux séances de la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires, ses membres ont droit au remboursement de leurs frais de déplacement dans les conditions prévues par le décret du 3 juillet 2006 susvisé.

Chapitre V : Dispositions transitoires et finales (Articles 16 à 19)

Article 16

A modifié les dispositions suivantes
Modifie Code de justice administrative – art. R312-14-2 (V)

Article 17

Les modalités de fonctionnement et les règles de procédure définies par le présent décret ne s’appliquent qu’à compter de l’installation du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires dans les conditions prévues par le III de l’article 54 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 susvisée.

Article 18

Sont abrogés à compter de l’installation du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires dans les conditions prévues par le III de l’article 54 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 susvisée :

A abrogé les dispositions suivantes :
– Décret n°2010-653 du 11 juin 2010
Art. 1, Art. 2, Art. 3, Art. 4, Art. 5, Art. 6, Art. 7, Art. 8, Art. 9, Art. 11, Art. 12, Art. 13, Sct. Annexe, Art. null
– Décret n°2011-281 du 18 mars 2011
Art. 1, Art. 2, Art. 3, Art. 4, Art. 5, Art. 6

Article 19

Le ministre des affaires étrangères et du développement international, le ministre des finances et des comptes publics, le ministre de la défense, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et la ministre des outre-mer sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Annexe

Article

Modifié par Décret n° 2019-520 du 27 mai 2019 – art. 7

LISTE DES MALADIES RADIO-INDUITES MENTIONNÉES À L’ARTICLE 1ER DE LA LOI DU 5 JANVIER 2010 SUSVISÉE RELATIVE À LA RECONNAISSANCE ET À L’INDEMNISATION DES VICTIMES DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS

Désignation des maladies
Leucémies (sauf leucémie lymphoïde chronique car considérée comme non radio-induite).
Myélodysplasies.
Cancer du sein.
Cancer du corps thyroïde pour une exposition pendant la période de croissance.
Cancer cutané sauf mélanome malin.
Cancer du poumon.
Cancer du côlon.
Cancer des glandes salivaires.
Cancer de l’œsophage.
Cancer de l’estomac.
Cancer du foie.
Cancer de la vessie.
Cancer de l’ovaire.
Cancer du cerveau et système nerveux central.
Cancer des os et du tissu conjonctif.
Cancer de l’utérus.
Cancer de l’intestin grêle.
Cancer du rectum.
Cancer du rein.
Cancer de la vésicule biliaire.
Cancer des voies biliaires.
Lymphomes non hodgkiniens.
Myélomes.

Fait le 15 septembre 2014.

Manuel Valls
Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères et du développement international,
Laurent Fabius
Le ministre des finances et des comptes publics,
Michel Sapin
Le ministre de la défense,
Jean-Yves Le Drian
La ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes,
Marisol Touraine
La ministre de la décentralisation et de la fonction publique,
Marylise Lebranchu
La ministre des outre-mer,
George Pau-Langevin

ANNEXE A LA DELIBERATION N° 2020-1 du 22 juin 2020 LA METHODOLOGIE suivie par le CIVEN

Avertissement

La raison d’être du CIVEN est d’appliquer la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, plusieurs fois modifiée, aux victimes présumées des essaisnucléaires français qui demandent à bénéficier de ses dispositions et remplissent les conditions légales.

Cette loi prévoit, dans son article 4, que « les demandes d’indemnisation sont soumises au comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, qui se prononce par une décision motivée ». Elle fixe les conditions créant la présomption d’un lien entre la maladie invoquée et l’exposition aux rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français ainsique les modalités du renversement éventuel de cette présomption.

Le décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 dispose, dans son article 13 que « Le comité détermine la méthodologie qu’il retient pour instruire la demande et prendre sa décision, en s’appuyant notamment sur les méthodologiesrecommandées par l’Agence internationale de l’énergie atomique » et que « La délibération du comité approuvant cetteméthodologie est publiée au Journal officiel de la République française. La description de cette méthodologie et ladocumentation y afférente sont publiées sur le site internet du comité et fournies au demandeur, à sa demande ».

Il appartient donc au CIVEN d’arrêter cette méthodologie et de la mettre en œuvre, dans chacun des cas qui lui est soumis.

Cette méthodologie doit, en premier lieu, être transparente, comme l’impose d’ailleurs la règlementation, c’est-à-direportée à la connaissance de tous, dans des termes compréhensibles par tous. Elle doit aussi être évolutive, en applicationnon seulement des textes qui peuvent eux-mêmes évoluer mais aussi des découvertes de la recherche scientifique et de l’expérience acquise par le CIVEN lui-même.

Pour la mettre en œuvre, deux principes guident le CIVEN : humanité et équité.

Le CIVEN est très attaché à l’écoute directe des présumées victimes ou de leur ayant droit. Il est pleinement conscient de la grande souffrance contenue et de la dignité des témoignages des demandeurs.

L’équité réside dans la garantie pour les demandeurs qu’au terme de l’examen circonstancié de leur dossier, les décisionsles concernant seront prises selon des règles égales pour tous.

Si le CIVEN prend en compte, conformément à la loi et au décret mentionnés, des mesures de la radioactivité pourestimer si une maladie est due à l’exposition aux rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français, sa décision ne résulte toutefois pas d’une addition au trébuchet des mesures du « détriment radioactif » lié aux essais.

Dans chaque cas il prend aussi en compte :

-L’appartenance du demandeur à un groupe à risque, en raison du sexe, de l’âge ou de l’activité professionnelle aumoment des essais, ou de toute circonstance particulière présentée par lui ;

– Les caractéristiques histologiques phénotypiques et les marqueurs génétiques ou épigénétiques de la pathologie déclarée, mentionnée sur la liste annexée au décret ;

– La radiosensibilité, variable selon les sujets, et en particulier, les données génétiques documentées selon les populations. Tel est, par exemple, le cas de la plus grande susceptibilité au cancer papillaire de la thyroïde radio-induit des populations originaires de Polynésie.

PREMIERE PARTIE : LES REGLES DE DROIT ET LEUR APPLICATION

L’activité du Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) est régie par :

– la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français ;

– le décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, pris pour son application ;

– la délibération n° 2019-1 du 28 octobre 2019, portant adoption du règlement intérieur du CIVEN, publiée au Journal officiel de la République française (JORF) du 22 novembre 2019 ;

– la délibération n° 2020-1 du 22 juin 2020 portant sur la méthodologie d’examen des demandes déposées devant le CIVEN publiée au JORF du 28 juin 2020, la présente note méthodologique annexée à cette délibération étantpubliée sur le site internet du CIVEN (www.gouvernement.fr/comite-d-indemnisation-des-victimes-des-essais-nucleaires-civen).

Cette note remplace la note méthodologique annexée à la délibération n° 2018-5 du 14 mai 2018 portant sur la méthodologie d’examen des demandes déposées devant le CIVEN publiée au JORF du 30 mai 2018, qui remplaçait elle-même une note du 11 mai 2015.

La méthodologie du CIVEN précise dans quelles conditions celui-ci, d’une part, apprécie le droit à la reconnaissance de la qualité de victimes des essais nucléaires français et, d’autre part, établit l’offre d’indemnisation lorsqu’il a reconnu cedroit.

La présente note examine successivement, dans cette première partie :

– les conditions dans lesquelles est constituée la présomption de causalité ;

– les conditions de son éventuel renversement.

Dans la seconde partie, elle précise les modalités de l’indemnisation.

I.- La constitution de la présomption de causalité :

La loi du 5 janvier 2010 a mis en place un régime de présomption légale.

Si trois conditions sont réunies par le demandeur – être atteint de l’une des maladies figurant sur une liste de maladies pouvant être radio-induites, c’est-à-dire provoquée par l’exposition à des rayonnements ionisants, avoir été présent danscertaines zones du Sahara ou en Polynésie française, et pendant les périodes des essais nucléaires, telles que définies par la loi – il est présumé être victime des essais nucléaires français.

Si le CIVEN, sous le contrôle de la juridiction administrative, apporte la preuve, qui lui incombe, que la maladie ne peut avoir été causée par les rayonnements dus aux essais nucléaires français, la présomption est renversée et le demandeur nepeut être reconnu comme victime de ces essais. Si le CIVEN ne peut apporter cette preuve, la présomption ne peut être renversée et le demandeur est reconnu comme victime de ces essais.

Si le demandeur est reconnu comme victime des essais, il a droit à être indemnisé intégralement de ses préjudices. La réparation n’est pas forfaitaire, elle doit s’appliquer au cas particulier du demandeur, qui peut faire état de tous lespréjudices qui n’ont pas déjà été réparés par un organisme, comme une caisse de sécurité sociale ou une mutuelle de santé.

A) La condition de maladie

L’article 1er de la loi du 5 janvier 2010 dispose en son I que « Toute personne souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français et inscrits sur une liste fixée par décret en Conseil d’Etat conformément aux travaux reconnus par la communauté internationale peut obtenirréparation intégrale de son préjudice dans les conditions prévues par la présente loi. »

Cette liste est annexée au décret du 14 septembre 2014 et comprend désormais 23 maladies, après ajout par le décret n° 2019-520 du 27 mai 2019 des cancers de la vésicule biliaire et des voies biliaires, conformément aux propositions de lacommission créée par le III de l’article 113 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017, de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière économique et sociale, dite loi EROM, commission dont le rapport figure également sur le site internet du CIVEN.

Pour que le demandeur soit reconnu comme victime des essais nucléaires français, la ou les maladies qu’il invoque doivent avoir été provoquées par l’exposition aux rayonnements ionisants dus à ces essais. Les maladies inscrites sur laliste annexée au décret du 15 septembre 2014 peuvent être radio-induites. Il revient au CIVEN d’apprécier si, dans le cas du demandeur, la maladie a bien été induite par l’exposition aux rayonnements des essais nucléaires français.

L’article 1er du décret du 14 septembre 2014, dans sa modification issue du décret du 27 mai 2019, mentionne désormais que « Les maladies figurant sur cette liste mais ayant pour origine des métastases secondaires à une maladie n’y figurantpas ne sont pas retenues pour l’application de ces dispositions ». En effet, si une maladie figurant sur cette liste provient d’une métastase d’une maladie qui n’y figure pas parce qu’elle n’est pas considérée comme radio-induite, la maladie ainsidérivée de cette maladie première ne peut pas elle-même être considérée comme radio-induite.

Le CIVEN peut être ainsi conduit à estimer que la maladie invoquée n’est pas de celles mentionnées par le décret du 14 septembre 2014 et que, par conséquent, la condition de maladie n’est pas satisfaite et la présomption n’est donc pascréée, dans les situations suivantes :

– Lorsque la demande elle-même fait état d’une maladie qui n’est pas inscrite sur la liste annexée au décret ;

– Lorsque l’analyse biopathologique des prélèvements indique qu’il ne s’agit pas d’une maladieinscrite sur cette liste, même si le demandeur l’a invoquée comme telle ;

– Lorsqu’une personne est atteinte d’une maladie figurant sur cette liste des maladies pouvant être radio-induites mais que des pièces de son dossier médical montrent que cette maladie résulte, dans son cas, d’une métastasesecondaire à une maladie qui n’est pas sur la liste.

B) La condition de lieu

L’article 2 de la loi du 5 janvier 2010 dispose désormais que la condition de lieu est satisfaite par la présence en Polynésie française, quel que soit l’île ou l’atoll de présence. Au contraire, pour les personnes déposant une demande au titre des essais intervenus au Sahara, il y a lieu d’établir leur présence au Centre saharien des expérimentations militaires ou au Centre d’expérimentation militaires des oasis, ou « dans les zones géographiques à ces centres », ces zones étant définies à l’article 2 du décret du 15 mars 2014 par leurs coordonnées géographiques.

Le CIVEN apprécie si cette condition de lieu est satisfaite au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont fournis par ledemandeur ou qu’il obtient auprès de ses employeurs (armée, administrations, entreprises) ou des collectivités territoriales: attestation de domicile, état de services etc.

C) La condition de date

Pour les dates des essais au Sahara, l’article 2 du décret de la loi du 5 janvier 2010 distingue les essais aériens réalisés au Centre saharien des expérimentations militaires (CESM), à Reggane et les essais en galerie, réalisés au Centre d’expérimentations militaires des oasis (CEMO), dans le Hoggar, à In Ecker.

Le premier essai à Reggane a eu lieu le 13 février 1960 et le dernier le 25 avril 1961. Le premier essai à In Ecker a eu lieule 7 novembre 1961 et le dernier le 16 février 1966. La loi retient les dates des 13 février 1960 et 7 novembre 1961 commedébut des périodes et la date unique du 31 décembre 1967, pour les deux sites, comme fin des périodes.

Pour les essais en Polynésie, la loi ne distingue pas entre les essais aériens, qui ont eu lieu du 2 juillet 1966 au 14 septembre 1974, et les essais souterrains, qui ont eu lieu du 5 juin 1975 au 27 janvier 1996, avec une interruption entre le 15 juillet 1991 et le 5 septembre 1995 et retient les dates du 2 juillet 1966 comme début de la période et du 31 décembre1998 comme fin.

Dans les deux cas, la preuve de la présence pendant ces périodes est appréciée par le CIVEN au vu des documents fournis par le demandeur ou de ceux qu’il obtient auprès des employeurs (armée, administrations, entreprises) ou des collectivités territoriales : attestation de domicile, état de services etc.

Si ces trois conditions de maladie, de date et de lieu sont réunies, le demandeur bénéficie de la présomption de causalité entre sa ou ses maladies et l’exposition aux rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français. Celle-ci peut ensuite être renversée si le CIVEN apporte la preuve d’une absence de lien entre la maladie et l’exposition à cesrayonnements, dans les conditions fixées à l’article 4 de la loi du 5 janvier 2010, modifiée.

II. – Le renversement de la présomption de causalité

A) La genèse de la nouvelle règle

La présomption de causalité entre la maladie et l’exposition aux rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires peutêtre renversée. Si elle ne pouvait pas l’être, cela signifierait que les maladies pouvant être radio-induites dont sont atteintes toutes les personnes présentes pendant les essais à ces endroits ont pour cause l’exposition aux rayonnements dus aux essais nucléaires français, ce qui ne peut naturellement correspondre à la réalité. Les maladies qui peuvent être radio-induites peuvent aussi avoir de toutes autres causes. Elles auraient été présentes en Polynésie s’il n’y avait pas eud’essais nucléaires. Le rôle du CIVEN est de déterminer, pour les personnes atteintes de ces maladies et présentes pendant les essais, si la maladie a, ou non, un lien avec l’exposition aux rayonnements dus aux essais.

La loi EROM du 28 février 2017 a supprimé cette modalité de renversement de la présomption, qui avait conduit à écarterla plupart des demandes, mais sans la remplacer par une autre possibilité de renverser la présomption de causalité. Le Conseil d’Etat, dans son avis contentieux n° 409777 du 28 juin 2017, en avait déduit, en l’absence de toute précisionlégale, que la présomption ne pouvait être renversée que si le CIVEN établissait que la maladie était due exclusivement àune autre cause ou que le demandeur n’avait reçu « aucun » rayonnement dus aux essais. En fait, ainsi que le rapporteur public devant le Conseil d’Etat l’indiquait lui-même dans ses conclusions devant la formation de jugement, ces démonstrations étaient pratiquement impossibles et la présomption ne pouvait être renversée. Selon son expression, elleétait devenue « quasi irréfragable ».

Cependant, demeurait l’article 1er de la loi du 5 janvier 2010. L’objet de la loi est de reconnaître la qualité de victime etd’indemniser « Toute personne souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français ». Il ne s’agit pas d’indemniser, à ce titre, toute personne atteinte d’unemaladie pouvant être radio-induite quelle que soit sa cause et c’est au CIVEN de déterminer si la cause réside dans les rayonnements dus aux essais nucléaires ou non.

Le CIVEN, faute de dispositions légales sur les conditions de renversement de la présomption, a donc dû, pour jouer le rôle que la loi lui confiait, dégager lui-même un critère en s’appuyant sur la réglementation générale existante et les données scientifiques établies.

Parallèlement, une commission a été mise en place pour travailler sur cet objectif commun, dégager

« les mesures destinées à réserver l’indemnisation aux personnes dont la maladie est causée par les essais nucléaires », ceque la loi du 5 janvier 2010 ne permettait plus puisque, dans l’interprétation du Conseil d’Etat, elle conduisait à accueillirpotentiellement toutes les demandes.

Selon le III de l’article 113 de la loi EROM ; « Une commission composée pour moitié de parlementaires et pour moitié de personnalités qualifiées propose, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi les mesuresdestinées à réserver l’indemnisation aux personne dont la maladie est causée par les essais nucléaires. Elle formule desrecommandations à l’attention du Gouvernement. »

Cette commission, comprenant six parlementaires, dont trois représentants de la Polynésie française, Madame Nicole Sanquer et Monsieur Moetaï Brotherson, députés et Madame Lana Tetuanui, sénatrice, ainsi que six spécialistes de lamédecine et du droit, présidée par Madame Lana Tetuanui, a rendu un rapport le 15 novembre 2018, qui n’a fait l’objet d’aucune expression d’opinion dissidente. Il a recommandé au Gouvernement de retenir la modalité de renversement de la présomption de causalité que le CIVEN avait déjà mise en œuvre, par sa délibération du 14 mai 2018, soit la limite de dose annuelle de 1 millisievert (1 mSv), sur le fondement des dispositions du code de la santé publique, transposant une directive de l’EURATOM, elle-même issue de recommandations de l’UNSCEAR (cf.infra).

Dans son rapport, la commission relève ainsi :

« Des considérations d’ordre juridique, prenant en compte les dimensions émotionnelles, affectives et psychologiques chez des sujets qui, atteints de cancer et ayant subi cette irradiation indue car imposée par l’Etat (quels que soient les motifs et leur recevabilité par ailleurs), légitiment donc cette présomption d’imputabilité liée à une irradiation ayant dépassé la limite réglementaire – de façon analogue à ce qui se passe en législation du travail par exemple. (…) »

La commission conclut ainsi sur ce point :

« La recherche de cohérence entre les recommandations de la commission et l’évolution constatée du fonctionnement duCIVEN compte tenu de la méthodologie employée, est aujourd’hui essentielle au moment où l’on constate une évolution très favorable du nombre de Polynésiens susceptibles d’être indemnisés par suite des récentes décisions du CIVEN. Lacommission EROM préconise que la situation de l’ensemble des populations ainsi que celle des travailleurs concernés soit alignée sur la mesure de 1 mSv. Cette recommandation nécessite une modification de la loi Morin par amendement législatif. »

A la fin de son rapport, la commission rappelle sa proposition d’un « Amendement législatif destiné à consolider laméthodologie provisoire du CIVEN employée pour l’examen des dossiers d’indemnisation en référence à l’article 1333-11 du code de la santé depuis le 1er janvier 2018 », précisant ainsi qu’elle entend que la limite de dose de 1 mSv par an s’applique dès que le CIVEN a commencé à la mettre en œuvre, début 2018.

Le Gouvernement ayant décidé de retenir cette proposition du rapport, deux amendements en ce sens ont été déposés auSénat, par le Gouvernement et par la présidente de la commission, Madame Lana Tetuanui, au projet de loi de finances pour 2019.

Ces amendements sont devenus l’article 232 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018, de finances pour 2019, modifiant la loi du 5 janvier 2010.

B) Les nouvelles normes légales et réglementaires

– La limite de dose de 1 mSv et son origine

Le V de l’article 4 de la loi du 5 janvier 2010, dans sa version issue de l’article 232 de la loi du 28 décembre 2018, dispose désormais :

« V.- Ce comité examine si les conditions sont réunies. Lorsqu’elles le sont, l’intéressé bénéficie d’une présomption de causalité, à moins qu’il ne soit établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires françaisreçue par l’intéressé a été inférieure à la limite de dose efficace pour l’exposition de la population à des rayonnements ionisants fixée dans les conditions prévues au 3° de l’article L. 1333-2 du code de la santé publique. »

Selon l’article L. 1333-2 du code de la santé publique :

« Les activités nucléaires satisfont aux principes suivants :

1° Le principe de justification, selon lequel une activité nucléaire ne peut être entreprise ou exercée que si elle est justifiée par les avantages qu’elle procure sur le plan individuel ou collectif, notamment en matière sanitaire, sociale, économiqueou scientifique, rapportés aux risques inhérents à l’exposition aux rayonnements ionisants auxquels elle est susceptible de soumettre les personnes ;

2° Le principe d’optimisation, selon lequel le niveau de l’exposition des personnes aux rayonnements ionisants résultant d’une de ces activités, la probabilité de la survenue de cette exposition et le nombre de personnes exposées doivent êtremaintenus au niveau le plus faible qu’il est raisonnablement possible d’atteindre, compte tenu de l’état des connaissances techniques, des facteurs économiques et sociétaux et, le cas échéant, de l’objectif médical recherché ;

3° Le principe de limitation, selon lequel l’exposition d’une personne aux rayonnements ionisants résultant d’une de cesactivités ne peut porter la somme des doses reçues au-delà des limites fixées par voie réglementaire, sauf lorsque cettepersonne est l’objet d’une exposition à des fins médicales ou dans le cadre d’une recherche mentionnée au 1° de l’article L. 1121-1. »

Les conséquences du principe de limitation pour les activités nucléaires sont fixées aux articles R. 1333-11 et R. 133-12 du code de la santé publique.

– article R. 1333-11

«I.- Pour l’application du principe de limitation défini au 3° de l’article L. 1333-2, la limite de dose efficace pourl’exposition de la population à des rayonnements ionisants résultant de l’ensemble des activités nucléaires est fixée à 1 mSvpar an, à l’exception des cas particuliers mentionnés à l’article R. 1333-12 ».

II. – La limite de dose équivalente est fixée pour :

1° Le cristallin à 15 mSv par an ;

2° La peau à 50 mSv par an en valeur moyenne pour toute surface de 1 cm2 de peau, quelle que soit la surface exposée.»

– article R1333-12

« Les limites de dose définies à l’article R. 1333-11 ne sont pas applicables aux personnes soumises aux expositions suivantes :

1° Exposition des patients au titre d’un diagnostic ou d’une prise en charge thérapeutique à base de rayonnements ionisants dont ils bénéficient, prévue au I de l’article L. 1333-18 ;

2° Exposition des personnes qui, ayant été informées du risque d’exposition, participent volontairement et à titre privéau soutien et au réconfort des patients mentionnés au 1° ;

3° Exposition des personnes participant volontairement à des programmes de recherche impliquant la personne humaineutilisant des sources de rayonnements ionisants, prévue à l’article L. 1333-18;

4° Exposition des personnes soumises à des situations d’urgence radiologique mentionnées au 1° de l’article L. 1333-3 ;

5° Exposition des personnes soumises à des situations d’exposition mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 1333-3 ;

6° Exposition des travailleurs lorsque l’exposition aux rayonnements ionisants résulte de leur activité professionnelleprévue à l’article L. 4451-1 du code du travail. »

Le décret du 15 septembre 2014, dans son article 13 modifié par le décret du 27 mai 2019, a retenu la limite de doseefficace fixée au 1 de l’article R. 1333-11 du code de la santé publique, soit la dose la plus faible, celle qui estadmissible pour tout public, alors même que certains des demandeurs étaient, lors de leur passage au Sahara ou enPolynésie, en activité professionnelle.

On doit souligner que cette limite de dose annuelle de 1 mSv n’est pas fixée par la seule réglementation nationale.

Ce niveau de 1 mSv par an pour le public résulte d’un consensus international s’appuyant notamment sur l’avis du Comité scientifique des Nations-Unies sur les sources et effets des radiations ionisantes (UNSCEAR) et sur lesrecommandations de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR). Les études scientifiques nepermettent pas de reconnaître l’origine radio-induite d’une maladie en dessous de la dose d’un millisievert. Ce niveau dedose admissible est repris par l’ensemble des organisations internationales : Organisation mondiale de la santé (OMS), Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Organisation internationale du travail (OIT), instances internationales de normalisation.

Il l’a aussi été par l’EURATOM, dans l’article 31 de la Directive 2013/59/Euratom du Conseil du 5 décembre 2013 fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire contre les dangers résultant de l’exposition aux rayonnements ionisants. C’est cette directive que le code de la santé publique a transposée.

Cette condition de renversement de la présomption est très différente de celle du « risque négligeable ». La dose reçuepeut seule être prise en compte, à l’exclusion des facteurs liés au délai de latence de maladie ou aux autres facteurs derisque (tabac, alcool etc.) qui conduisaient, au titre des calculs du « risque négligeable » à écarter un certain nombre dedemandes.

C’est désormais la norme légale et réglementaire qui s’impose au CIVEN. Attentif à chaque cas particulier, le CIVENadmet cependant, dans certaines circonstances, notamment en raison de l’âge d’exposition pour certains cancers, ou du poste de travail, de reconnaître comme victime des personnes qui ont reçu une dose inférieure à 1 millisievert.

– La date d’entrée en vigueur de la nouvelle norme

Il est constant qu’en matière de responsabilité, sauf mention contraire, la loi s’applique immédiatement, y compris auxdemandes déposées antérieurement à son entrée en vigueur.

Cependant, par deux décisions du 27 janvier 2020, n° 429574 et 432578, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a jugé que :

« En modifiant les dispositions du V de l’article 4 de la loi du 5 janvier 2010 issues de l’article 113 de la loi du 28 février 2017, l’article 232 de la loi du 28 décembre 2018 élargit la possibilité, pour l’administration, de combattre la présomption de causalité dont bénéficient les personnes qui demandent une indemnisation lorsque les conditions de celles-ci sont réunies. Il doit être regardé, en l’absence de dispositions transitoires, comme ne s’appliquant qu’aux demandes qui ont été déposées après son entrée en vigueur ».

Le Parlement a, ensuite, indiqué explicitement sa volonté que la règle du 1 mSv s’applique dès sa mise en œuvre par le CIVEN, conformément à la recommandation de la commission de la loi EROM que sa présidente avait rappelée dans sonintervention au Sénat pour le vote de l’article 232 de la loi du 28 février 2018.

L’article 57 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne dispose ainsi que : « Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, le b du 2° du I de l’article 232 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 est applicable aux demandes déposées devant le comité d’indemnisation desvictimes d’essais nucléaires avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 précitée. »

Le critère de la limite de dose de 1 mSv s’applique donc, à nouveau, pour toutes les demandes déposées au CIVEN, quelle que soit la date de dépôt de la demande.

C) L’application des normes par le CIVEN

1. La vérification de la présomption de causalité :

Après avoir vérifié l’identité et la qualité du demandeur – victime ou, en cas de décès de celle-ci, ayant-droit, le CIVEN examine si sont réunies les trois conditions créant la présomption de causalité.

Le comité vérifie ainsi :

– que la victime est, ou a été, atteinte d’une ou plusieurs des maladies considérées comme pouvant être radio-induites, mentionnées en annexe au décret n° 2014-1019 du 15 septembre 2014 ;

– qu’elle a résidé ou séjourné (sans durée minimale) dans les zones du Sahara précisées à l’article 2 de ce décret, ou en Polynésie française ;

– que cette présence à ces endroits a eu lieu à des dates incluses dans les périodes mentionnées à l’article 2 de la loi.

Si l’une de ces conditions n’est pas satisfaite, la demande doit être rejetée.

2. L’appréciation de la possibilité de renverser la présomption de causalité

Le CIVEN doit, pour renverser la présomption de causalité, établir que la dose annuelle reçue est inférieure à 1mSv. S’il ne le démontre pas, la demande doit être accueillie.

Il s’agit de la dose totale reçue, par exposition externe aux rayonnements ou par contamination interne, par ingestion deliquides ou d’aliments pouvant contenir des radioéléments ou par inhalation, sur une période de 12 mois.

Pour établir s’il y a eu ou non dépassement de la limite de dose, le CIVEN s’appuie sur des mesures individuelles ou collectives ou des résultats d’examens biologiques.

Les mesures disponibles n’étant pas les mêmes selon les lieux et les périodes, le CIVEN a adapté sa méthodologie à ces différentes situations, en privilégiant toujours l’approche qui permet de garantir que la limite de dose n’a pas été dépassée.

2.1. Pour les personnes en activité dans les zones d’essais du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) en Polynésie française

Ces personnes sont celles qui ont travaillé, sous différents statuts (militaires, agents du CEA, salariés de leurs entreprises sous-traitantes), sur les sites des essais nucléaires à Moruroa et Fangataufa, où ont été effectués des tirs, ainsi que sur certaines parties de l’île d’Hao, où des contaminations par suite du retour d’aéronefs ayant participé aux tirs ont pu seproduire.

Les personnes ayant travaillé dans des établissements relevant administrativement du CEP mais présentes dans d’autresîles (notamment à Tahiti) ne sont pas considérées comme présentes au CEP au sens de cette méthodologie. Pour l’examen de leur situation au regard de l’exposition externe comme de la contamination interne, elles sont assimilées à la population polynésienne présente dans les îles.

Pour l’évaluation du niveau d’exposition des personnes présentes au CEP, il y a lieu d’apprécier la dosimétrie externe, mesurant l’exposition externe aux rayonnements ionisants, et la dosimétrie interne, déterminant l’éventuellecontamination interne. Cette contamination interne peut notamment être appréciée à l’aide d’examensanthroporadiamétriques ou radiotoxicologiques.

– Le rayonnement externe :

Selon les périodes et les postes de travail occupés, il a été mesuré par des dosimètres individuels portés par les personnes pendant leur présence sur le site, ou pendant les essais seulement, ou uniquement par les personnes pénétrant dans les zones contrôlées.

Selon la jurisprudence, il appartient au CIVEN d’établir que « les mesures prises étaient en adéquation avec la situationde chaque personne au regard du risque d’exposition ».

Dans certains cas, l’absence de port d’un dosimètre individuel peut être justifié par les tâches à accomplir, qui neconduisaient pas la personne à entrer dans une zone où un risque d’exposition se présentait.

Dans d’autres cas, le CIVEN, en l’absence de mesures individuelles, s’appuie sur les résultats de mesures dosimétriques de zones (dosimétrie d’ambiance).

– Ces mesures permettent de déterminer directement si le rayonnement externe reçu a ou non dépassé la dose-limiteannuelle de 1 mSv.

– La contamination interne :

Elle s’ajoute au rayonnement externe mais ne se mesure pas de la même manière.

La contamination interne, qui se produit par ingestion d’eau ou d’aliments ou par inhalation, peut être établie par lesrésultats d’examens anthroporadiamétriques ou radiotoxicologiques des excrétas.

Dans certains cas, la contamination interne peut être exclue sans qu’il ait été procédé à ces examens.

Des examens anthroporadiamétriques ont pu être réalisés à l’arrivée sur le site, et/ou lors de contrôles périodiques, et/ou lors d’un incident d’exposition, et/ou au départ du site. Ces examens étaient le plus souvent réalisés à titresystématique au départ du site.

Les examens anthroporadiamétriques ont pour objet de rechercher la présence de radioéléments d’origine non naturelle dans le corps humain. Leurs résultats peuvent révéler des pics de présence de ces radioéléments (césium par exemple). Ilpeut aussi exister une présence multiple de radioéléments ce qui augmente le niveau moyen de radioactivité mais sans qu’il y ait de pic spécifique. Dans ce cas, la contamination interne peut être constatée par un « indice de tri » égal ou supérieur à 2. L’indice de tri correspond au rapport entre la radioactivité moyenne chez le sujet et le niveau de radioactivité normal. S’il est égal ou supérieur à 2, c’est-à-dire si le niveau de radioactivité est le double de ce qui est normal, la contamination interne est retenue, même en l’absence de pic d’un radioélément.

Ce résultat en indice de tri ne peut être converti en millisievert. On considèrera donc que même si le résultant de ladosimétrie externe est inférieur à 1 mSv, un indice de tri égal ou supérieur à 2 doit conduire à conclure que la présomption ne peut être renversée, compte tenu de ce résultat et du poste de travail.

Pour les résultats des examens radiotoxicologiques des excrétas, la mesure de radioéléments issus des essais doit conduire, à elle seule, à conclure que la présomption ne peut être renversée compte tenu de ce résultat et du poste detravail.

Dans les cas qui ne donnent pas lieu à une surveillance spécifique, la contamination interne peut être exclue lorsque :

– le poste de travail ne met pas en contact le travailleur avec des produits contaminés ;

– l’alimentation et l’eau ne sont pas contaminées ;

– il n’y a pas eu de retombées directes ;

– les résultats des mesures sur des filtres à air ne mettent pas en évidence la possibilité decontamination interne par inhalation.

Qu’il s’agisse d’irradiation externe ou de contamination interne, le CIVEN peut estimer que, pour certains postes etpériodes de travail, il y a eu contamination, même sans mesures l’établissant.

2.2 Pour les personnes présentes au Sahara, dans les zones mentionnées par le décret du 15 septembre 2014

Les remarques méthodologiques qui suivent sont applicables au personnel ayant travaillé sur les sites du Centre sahariend’expérimentations militaires (CSEM, à Reggane) ou au Centre d’expérimentations militaires des oasis (CEMO, à In Ekker).

En l’absence de dosimètre, il y a lieu d’estimer les doses reçues par le demandeur en fonction de ses dates de présencesur le site et de la nature de ses activités. Dans tous les cas, on tiendra compte des localisations de la personne, au regard des postes de travail occupés.

Après les essais nucléaires, ces zones ont été caractérisées par la présence de vents de sable contaminés.

Les résultats des filtres à air donnent en becquerel par m3 (Bq/m3) une estimation de la contamination interne. Lesrésultats sont le plus souvent différents selon les zones, au CESM et au CEMO, base-vie ou lieu d’activité. Le CIVENretient le plus élevé des deux.

Dans ce cas également, qu’il s’agisse d’irradiation externe ou de contamination interne, le CIVEN peut estimer que pour certains postes et périodes de travail il y a eu contamination, même sans mesures l’établissant.

2.3. Pour les personnes présentes en Polynésie française en dehors des sites du CEP

Les conséquences des retombées radioactives pour les essais atmosphériques sont appréciées pour ces îles par la dose efficace engagée, qui prend en compte tant l’exposition externe que la contamination interne et est calculée selon desméthodes et références adoptées au plan international (AIEA, CIPR, OMS, EURATOM). Pour la période des essaisatmosphériques, l’ensemble de ces doses figure, sous forme de tables, dans une étude du CEA de 2006, dont laméthodologie et les résultats ont été validés par un groupe de travail international missionné par l’AIEA. Tous ces documents sont sur le site internet du CIVEN.

Ces tables sont établies pour chaque année (1966 à 1974), en fonction du lieu de résidence et de la date de naissance de l’intéressé, avec des données distinctes pour la dose à la thyroïde. La dose efficace engagée intègre chaque année l’ensemble des doses dues à l’irradiation externe reçues dans l’année et la dose engagée résultant de l’incorporation dans l’année (par inhalation ou ingestion) des différents éléments radioactifs.

La dose ainsi estimée, par année et selon l’âge d’exposition, est une dose collective maximum. Ainsi, si cette dose est inférieure à 1 mSv, les doses reçues individuellement à cet endroit et pour les années considérées par les personnes concernées sont-elles nécessairement inférieures à ce maximum.

Lorsque des personnes ont successivement travaillé sur les sites du CEP ou au CEA et résidé en Polynésie en dehors dessites, il y a lieu de prendre en compte les résultats de la dosimétrie externe et interne sur les sites et celle de la doseefficace engagée pour l’atoll de résidence, en fonction des périodes de résidence.

Pour les doses efficaces engagées pendant les essais nucléaires souterrains ayant eu lieu en Polynésie à partir de 1975, après la fin des essais dans l’atmosphère, le CIVEN utilise les résultats obtenus par le réseau de surveillance de l’IRSN. Cette surveillanceest exercée depuis 1975, selon les mêmes méthodologies internationales que celle de l’étude du CEA. Elle concerne sept îles (Tahiti, Maudit, Hao, Rangiroa, Hiva Oa, Mangareva et Tubuai), représentatives des cinq archipels, et consiste à préleverrégulièrement des échantillons de nature variée dans les différents milieux (air, eau, sol) avec lesquels la population peut être encontact, ainsi que des denrées alimentaires, en distinguant entre les enfants et les adultes.

L’IRSN a mené une étude couvrant la période 1974 – 1981 (inclus) et une autre pour la période commençant en 1982.

Ainsi sont disponibles les données des doses efficaces engagées depuis le début des essais nucléaires en Polynésie.

DEUXIEME PARTIE : LA PROCEDURE D’INDEMNISATION

I. – La décision d’indemnisation et la nature de l’indemnisation

Une fois que le CIVEN a reconnu à un demandeur la qualité de victime des essais nucléaires ou d’ayant droit d’unevictime, le CIVEN doit fixer le montant de son indemnisation.

Selon l’article 1er de la loi du 5 janvier 2010 modifiée relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes desessais nucléaires français, la réparation du préjudice est « intégrale ».

Cette réparation étant intégrale et non forfaitaire, le CIVEN doit d’abord confier à un médecin expert le soin d’estimertous les préjudices subis. Au vu du rapport de l’expert, il revient ensuite au CIVEN d’arrêter le montant de chacun despréjudices à indemniser puis d’attribuer à la victime ou à son ayant droit une indemnisation, correspondant au total des montants de l’indemnisation des préjudices, éventuellement augmenté d’intérêts moratoires.

Lorsque la qualité de victime ou d’ayant droit de victime résulte d’une décision juridictionnelle, annulant une décision de rejet du CIVEN, cette décision peut renvoyer au CIVEN le soin de fixer après expertise médicale, le montant del’indemnisation ou bien ordonner directement une expertise et décider, par une nouvelle décision juridictionnelle, du montant de l’indemnisation.

Par son avis contentieux n°400375 du 17 octobre 2010[1], le Conseil d’Etat a jugé « qu’en confiant au CIVEN la mission d’indemniser, selon une procédure amiable exclusive de toute recherche de responsabilité, les dommages subis par les victimes de ces essais, le législateur a institué un dispositif assurant l’indemnisation des victimes concernées au titre de lasolidarité nationale ».

Il en a déduit, d’une part, que le contentieux de cette procédure relevait du plein contentieux et, d’autre part, que la loi ayant pour « objet d’assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation du dommage subi par les victimes des essais nucléaires français, et non de reconnaître que l’Etat, représenté par le CIVEN, aurait la qualité d’ ” auteur responsable ” ou de ” tiers responsable ” des dommages, par suite, les recours des tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d’un dommage corporel, organisés par l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale s’agissant des caisses de sécurité sociale et par la délibération du 14 février 1974 de l’assemblée territoriale de la Polynésie française s’agissant des organismes de sécurité sociale de cette collectivité, ne peuvent être exercés devant le CIVEN sur le fondement de la loidu 5 janvier 2010 ».

En conséquence, le CIVEN ne peut plus, depuis cette décision, contrairement à ce qu’il faisait avant qu’elle ne soit rendue,rembourser aux caisses de sécurité sociale les sommes qu’elles ont engagées pour prendre en charge les frais d’hospitalisation ou de soins aux victimes pour la maladie au titre de laquelle elles sont reconnues victimes. Le CIVEN ne peut, désormais, prendre en compte, dans l’indemnisation qu’il verse à la victime ou à son ayant droit, que les frais engagés par la victime qui n’ont pas fait l’objet d’un remboursement par un organisme de sécurité sociale.

II. – L’estimation des préjudices et la détermination du montant de l’indemnité

Pour respecter le principe de la réparation intégrale des préjudices subis par la victime, il convient d’apprécier les préjudices de toutes natures subis par la victime.

Le CIVEN a retenu la liste des préjudices fixés dans la nomenclature dite « nomenclature Dintilhac », du nom de M. Jean-Pierre Dintilhac, qui a notamment exercé les fonctions de président de la deuxième chambre civile à la Cour de cassation. Cette nomenclature est issue d’un groupe de travail, présidé par ce magistrat qui, en 2004, avait reçu pour mission d’élaborer une nomenclature commune des préjudices corporels afin de garantir « le droit des victimes de préjudices corporels à une juste indemnisation[2] », en harmonisation les conditions de leur indemnisation. Cettenomenclature n’a pas de valeur règlementaire. Elle n’est qu’indicative. Le CIVEN a choisi de s’y référer car elle lui a semblé la mieux à même de répondre, selon l’objectif que s’était assigné le groupe de travail qui l’a proposée, à « l’attente légitime des victimes qui souhaitent une lisibilité de leurs préjudices susceptibles d’être indemnisés[3] ».

Pour l’évaluation des différents postes de préjudices imputables à la pathologie radio-induite, le CIVEN a recours à uneexpertise médicale, réalisée par un médecin spécialisé dans l’indemnisation du dommage corporel. Il est choisi par leCIVEN notamment sur une des listes nationales d’experts mentionnées au I de l’article 2 de la loi n°71-478 du 29 juin 1971 modifiée relative aux experts judiciaires.

Les modalités de la réalisation de cette expertise médicale sont fixées à l’article 12 du décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Certaines deses dispositions sont précisées par le règlement intérieur du CIVEN, dont les références ont été indiquées dans la premièrepartie.

L’expertise est contradictoire.

Le CIVEN adresse une lettre de mission d’expertise au médecin choisi. Celui-ci la renvoie signée, confirmant ainsi son accord sur le principe et les modalités de l’expertise à réaliser. L’expert convoque la victime par lettre recommandée,reçue au moins quinze jours avant la date de l’expertise. La convocation précise l’objet, la date et l’heure de l’expertise ainsi que le lieu où elle doit se dérouler. Elle indique que le demandeur peut se faire assister de toute personne de son choix.En cas de besoin, l’expert désigné peut s’adjoindre tout sapiteur de son choix.

L’expert dispose d’un délai de deux mois à compter de la date de réception de la lettre de mission pour déposer son pré-rapport, en deux exemplaires, l’un destiné au CIVEN, l’autre à la victime. Ce délai peut être exceptionnellement prolongé sur demande justifiée du médecin, pour une nouvelle durée de deux mois. En cas de non-respect de ces délais, le CIVEN peut faire appel à un autre médecin pour procéder à l’expertise. Dans ce cas, le paiement des travaux déjà réalisés ne serapas dû. Le demandeur ou son conseil adresse des observations à l’expert sur le pré-rapport, qui sont transmises au CIVEN. L’expert dispose d’un délai de 15 jours pour répondre aux différentes observations dans son rapport définitif, transmis également aux parties.

Le CIVEN évalue le montant de l’indemnisation correspondant aux préjudices, en se fondant sur les recommandations du rapport d’expertise. Le montant de l’indemnisation de chaque préjudice est fixé en appliquant au niveau de gravité oude durée du préjudice proposé par l’expert un montant à partir d’un barème arrêté par une délibération du CIVEN. Ce barème a été établi à partir de différents barèmes mis en œuvre pour l’indemnisation de victimes. Il prévoit, selon les types de préjudices, des montants fixes ou des « fourchettes » de montants indicatives. Le CIVEN fixe l’indemnisationde chaque préjudice puis calcule l’indemnisation totale qui sera proposée.

L’offre d’indemnisation comporte le détail des postes correspondant aux différents préjudices et le total de l’indemnisation proposée. Cette offre d’indemnisation est adressée au demandeur. Elle constitue une proposition. Dans l’hypothèse où ledemandeur ou son conseil présente des demandes additionnelles, le CIVEN peut saisir à nouveau l’expert pour lui demander s’il maintient ses propositions initiales ou s’il les modifie, dans le cadre d’un « dire ».

Comme il a été dit, le montant de l’indemnité revenant à la victime ne prend pas en compte les sommes déjà perçues par elle de la part d’autres organismes (Etat, sécurité sociale, mutuelles etc.) en remboursement de sommes exposées, non plus que les indemnités en capital ou sous forme de pensions éventuellement versées pour les mêmes préjudices.

Lorsque l’offre d’indemnisation a été acceptée par la victime ou l’ayant droit, l’indemnité lui est versée. Si le demandeur est décédé, le CIVEN verse ce montant à un ou plusieurs ayants droit, au vu des règles successorales.

Le versement à la victime est effectué, soit sur le compte de la victime ou du ou des ayants droit, soit, si elle a un conseil, sur le compte ouvert par celui-ci à la caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats, ou CARPA, caisse qui estun organisme intra-professionnel de sécurisation des opérations de maniements de fonds réalisées par les avocats pour le compte de leurs clients.

Si la victime est décédée, l’indemnité est versée sur le compte du notaire en charge de la succession ou sur le compte CARPA du conseil du demandeur, à charge pour celui-ci de prendre en compte les règles successorales.

III. – La méthodologie d’estimation des différents préjudices

Comme il a été dit, le CIVEN prend en compte, de manière individualisée, les préjudices de chaque victime directe enévaluant l’ensemble des préjudices subis.

La notion de consolidation.

La consolidation de l’état de santé d’une personne atteinte d’une pathologie représente le moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent, sinon définitif, de telle sorte qu’un traitement n’est plus nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation, et qu’il est possible d’apprécier l’existence éventuelle d’une Atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique (AIPP).

La consolidation ne doit pas être confondue avec la guérison. Un fait nouveau peut aussi entraîner une aggravation ou une rechute. La consolidation peut être avec séquelles – des conséquences dommageables subsistent, ou sans séquelles – aucune conséquence dommageable ne subsiste, ce qui ne signifie pas qu’il n’y a pas eu de conséquences dommageables dans le passé, donnant droit à indemnisation.

Le CIVEN distingue les préjudices avant et après consolidation.

A) Les préjudices avant consolidation

1. Les préjudices patrimoniaux temporaires

Les dépenses de santé actuelles (DSA)

Ensemble des frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques.

Le cancer étant une affection de longue durée (ALD) donnant, dès le diagnostic, droit au remboursement à 100% de ces frais, les postes déjà pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle ne sont pas remboursés par le CIVEN (sauf dépenses justifiées et non remboursées, au titre de frais divers cf. infra).

Les pertes de gains professionnels actuels (PGPA)

Ce sont les pertes actuelles de revenus subies par la victime du fait de son dommage, compensées uniquement jusqu’à laconsolidation. Elles sont indemnisées sur production de justificatifs (bulletins de salaire, avis d’imposition, relevé decarrière de la sécurité sociale, indemnités journalières…).

Les pertes de gains professionnels sont appréciées au regard du revenu de référence revalorisé et des salaires réellement perçus avant l’arrêt maladie.

Les frais divers (FD)

Ces frais divers sont indemnisés uniquement s’ils sont mentionnés dans le rapport d’expertise et justifiés par laproduction de justificatifs :

– Frais de déplacements indemnisés[4] (déplacements médicaux, déplacement au rendez-vous d’expertise) ;

– Frais d’entretien que l’état de santé de la victime ne lui permet plus d’assurer lui-même : dépenses justifiées par une facture acquittée ou forfait annuel d’un montant de 100 € ;

– Achats de produits de santé non remboursés par la sécurité sociale et la mutuelle ;

– Appareillage lié à la personne.

L’assistance par tierce personne (ATP)

Ce poste correspond à l’indemnisation de la perte d’autonomie de la victime atteinte, à la suite du fait dommageable, d’un déficit fonctionnel temporaire, la mettant dans l’obligation de recourir à une tierce personne pour lui apporter une assistance dans les actes de la vie quotidienne.

On distingue, selon les qualifications de l’aide, l’aide spécialisée et l’aide non spécialisée et, au sein de la première, un aide active et une aide passive (présence).

– Aide non spécialisée

o Aide active non spécialisée : actes légers de la vie courante assurés par la personne aidante (courses, ménage, toilette, déplacements, aide familiale, …) :

§ Supérieure à 3 heures d’aide/jour : 12 € / heure

§ Inférieure ou égale à 3 heures d’aide/jour :10 € / heure

o Aide passive non spécialisée : assistance nocturne ou diurne : 10 € / heure

– Aide spécialisée

L’aide spécialisée est indemnisée sur production de pièces justificatives, déduction faite des crédits d’impôts et autres avantages fiscaux, pour l’aide-ménagère, la conduite d’un véhicule et autres formes d’aide à la personne, etc. : 16 € / heure.

2. Les préjudices extrapatrimoniaux temporaires

Le déficit fonctionnel temporaire total ou partiel (DFTT/DFTP)

L’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des « joies usuelles de la vie courante » durant la maladie font l’objet d’une indemnisation forfaitaire.

Le montant est de 25 € / jour.

Les souffrances endurées (SE) et les troubles dans les conditions d’existence (TCE)

Ce poste comprend toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que les troubles associés que doit endurer la victime durant la maladie. Ce préjudice est évalué sur une échelle exprimée en degrés de 1 à 7.

L’expert évaluera les souffrances endurées par la victime sur cette échelle. S’il estime que les souffrances endurées sontaugmentées par suite de l’anxiété due au caractère évolutif de la maladie, il pourra prendre en compte des « troubles dans les conditions d’existence », conduisant à les majorer.

Les préjudices esthétiques temporaires

Ce poste recouvre l’altération majeure – mais temporaire – de l’apparence physique, dont les conséquences personnelles sont très préjudiciables. Le préjudice résulte de la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers. Les critères pris en compte pour fixer le montant de l’indemnisation sont, notamment, la gravité de l’altérationphysique en cause et la durée de cette situation. Le préjudice est indemnisé en fonction du même référentiel de gravité que celui des souffrances endurées.

Si l’expert évalue ce préjudice pour des périodes continues à des cotations différentes, en raison de l’évolution de l’apparence physique de la victime, on appliquera des taux différences pour chacune des périodes, au prorata temporis.

B) Les préjudices après consolidation

1. Les préjudices patrimoniaux permanents

Les frais divers (FD)

• Frais de logement adapté (FL)

Ce poste est constitué des frais que doit débourser la victime à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d’un habitat en adéquation avec son état de santé après la consolidation. Il inclut les dépensesd’aménagement du domicile préexistant mais aussi les coûts d’acquisition ou de location d’un domicile mieux adapté. Il peut inclure les dépenses correspondant à la possibilité pour la victime de disposer d’un autre lieu de vie que son logement habituel, adapté à son handicap, de type foyer ou maison médicalisée. Il comprend aussi les frais dedéménagement et d’emménagement (aménagement du nouveau logement).

• Frais de véhicule adapté (FV)

Ce poste est constitué des dépenses d’aide à l’autonomie de la victime atteinte d’un handicap permanent, pour lui permettre de se déplacer. Il peut s’agir de dépenses correspondant au surcoût du renouvellement du véhicule par unvéhicule adapté, ainsi qu’à son entretien ou aussi des surcoûts de frais de transport pour permette son accessibilité auxtransports en commun. Sur pièces justificatives (factures acquittées).

Ces dépenses ne peuvent être indemnisés que sur pièces justificatives (factures acquittées)

Les pertes de gains professionnels futurs (PGPF)

Ce poste vise à indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à son incapacité permanente, partielle ou totale pour l’exercice de sa profession, à la suite du dommage, à compter de la date de consolidation. Cette perte peut provenir soit de la perte de son emploi, soit du coût d’arrêts de travail, soit de l’obligationd’exercer un emploi à temps partiel à la suite du dommage consolidé. Ces pertes sont indemnisées sur production de justificatifs tels que bulletins de salaire, avis d’imposition, relevé de carrière de la sécurité sociale, justificationsd’indemnités journalières….

Les pertes de gains professionnels de la consolidation à la retraite sont calculées à partir du revenu de référence revalorisé et des salaires réellement perçus avant l’arrêt maladie selon la même méthode que pour les pertes de gains professionnels avant la consolidation.

L’incidence professionnelle (IP)

Ce poste a pour objet la prise en compte des dommages relatifs à l’évolution de la vie professionnelle de la victime, telque le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, ou la perte d’une chance professionnelle. Ce poste comprend les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste et laperte de droits à la retraite que la victime va devoir supporter du fait de la diminution de ses revenus professionnels en raison de son handicap. L’appréciation est faite au cas par cas selon la situation professionnelle, sur justificatifs.

La date de départ en retraite prise en compte pour estimer ces dommages est la date à partir de laquelle la victime réunitles deux conditions suivantes : avoir atteint l’âge minimum légal de départ en retraite et avoir cotisé pendant la totalité de la durée de référence pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

L’assistance par tierce personne (ATP)

Ce poste permet l’indemnisation de la perte d’autonomie de la victime restant atteinte, à la suite du fait dommageable et après la consolidation, d’un déficit fonctionnel permanent, la mettant dans l’obligation de recourir à une tierce personne pour lui apporter une assistance dans les actes de la vie quotidienne.

Les mêmes catégories d’aide sont retenues, avec les mêmes taux d’indemnisation horaire que pour l’assistance par tiercepersonne avant consolidation.

2. les préjudices extrapatrimoniaux permanents

Le déficit fonctionnel permanent (DFP)

Ce poste indemnitaire comprend, pour la période postérieure à la consolidation, « les atteintes aux fonctions physiologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existencepersonnelles, familiales et sociales[5] ».

L’indemnisation est calculée en fonction, d’une part, du pourcentage du déficit fonctionnel permanent, donc de la gravité et, d’autre part, de l’âge au moment de la consolidation, afin de prendre en compte l’espérance de vie moyenne à cet âge.

En cas de décès de la victime après consolidation de son état de santé, un calcul au prorata temporis du déficit fonctionnel permanent est appliqué.

En cas de pathologies multiples, un calcul est réalisé selon la règle des capacités restantes, dite règle de Balthazar, qui consiste à calculer d’abord un déficit sur une pathologie, d’où résulte une capacité restante, sur laquelle s’appliqueseulement le taux d’incapacité pour la deuxième pathologie.

Le préjudice d’agrément

Ce poste de préjudice vise à réparer le préjudice lié à l’impossibilité, pour la victime, de pratiquer régulièrement uneactivité sportive ou de loisirs qu’elle exerçait avant l’accident.

Ce préjudice est indemnisé dès lors qu’existe un déficit fonctionnel permanent.

L’indemnisation est estimée à 10 % du montant du DFP attribué s’il s’agit d’une activité mentionnée dans le rapport del’expert ou selon le montant justifié par le demandeur.

Le préjudice esthétique permanent

Ce poste correspond à une altération permanente de l’apparence physique. Ce préjudice est évalué sur une échelle exprimée en degrés de 1 à 7. Il est indemnisé en fonction du référentiel des souffrances endurées.

Le CIVEN calcule le préjudice esthétique permanent au prorata temporis dans le cas où l’expert l’a évalué pourplusieurs périodes distinctes pour une pathologie consolidée une seule fois, éventuellement à des niveaux de gravitédifférent.

Si toutefois l’expert consolide deux pathologies à deux dates différentes, le préjudice sera évalué deux fois, de manièredistincte.

Le préjudice sexuel

Ce préjudice, destiné à compenser les troubles dans l’exercice de l’activité sexuelle, est indemnisé en fonction de sacaractérisation par l’expert dans le rapport.

Le préjudice d’établissement

Ce poste, qui représente la perte de chance de réaliser normalement un projet de vie, en raison de la gravité du handicap, est indemnisé selon le cas particulier. Le projet de vie est la possibilité de fonder une famille tout autant que de créer uneactivité professionnelle nouvelle.

Préjudice permanent exceptionnel

La Cour de cassation le définit comme « Préjudice atypique directement lié au déficit fonctionnel permanent, qui prend une résonance particulière pour certaines victimes en raison soit de leur personne, soit des circonstances et de la nature du fait dommageable[6] ». Ce poste de préjudice est qualifié d’exceptionnel en raison de sa consubstantialité aux cancers.Pour les cancers, il n’est donc habituel.

Ce préjudice prend en compte la gravité et les conditions d’évolution de la maladie, par un examen attentif de chaque cas particulier.

Ce poste de préjudice, qui doit avoir un caractère définitif, est indemnisé s’il est décrit par l’expert, selon son lien avec les séquelles imputables et qualifié selon son importance en trois niveaux de gravité :

– moyen
– important
– très important.

[Notes de bas de page]

[1] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000033255699

[2] Intitulé du programme d’action de Mme Nicole Guedj, Secrétaire d’Etat aux droits des victimes

[3] https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_groupe_de_travail_nomenclature_des_prejudices_corporels_de_Jean- Pierre_Dintilhac.pdf

[4] Selon le barème du bulletin officiel des finances publiques applicable.

[5] Arrêt de la Cour de cassation, 28 mai 2009.

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